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Le berbère en Mauritanie : une langue en voie d’extinction
vendredi 6 août 2004, par
A l’instar de la quasi-totalité des Etats, même lorsqu’ils sont des systèmes autoritaires ou tout simplement des dictatures, l’Etat mauritanien a signé et ratifié la Convention internationale pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Au titre d’Etat partie de cette Convention, la Mauritanie se doit, comme le stipulent les termes de la Convention, de présenter régulièrement au Secrétaire général de l’ONU un rapport sur les mesures arrêtées par l’Etat pour se conformer à la Convention. Le rapport est examiné par le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) qui auditionne une délégation représentant l’Etat.
Lors de la session courante du CERD qui a lieu du 2 au 20 août, la Mauritanie aura à présenter ses 6e et 7e rapports qui seront examinés par le Comité.
L’Etat mauritanien, tout comme la quasi-totalité des Etats notamment autoritaires à son image, dira que tout va bien en Mauritanie et que l’Etat déploie tous les efforts pour que les citoyens soient heureux. L’Etat mauritanien sera présenté comme celui qui respecte et protège toutes les libertés... y compris les libertés linguistiques même s’il aura à soutenir que les arabophones (voir les Arabes) sont l’écrasante majorité qui compose le "peuple mauritanien" ! Il pourra même se vanter d’être un Etat qui reconnaît les langues du pays ; oui, car l’on ne peut l’imaginer mais la Constitution mauritanienne reconnaît quatre langues nationales : l’arabe, le poular, le soninké et le wolof. Cependant l’unique langue officielle reconnue étant l’arabe.
Oui, sauf que la langue berbère est tout simplement ignorée. La langue du plus vieux peuple de la région se trouve ignorée voir méprisée. En effet, la langue berbère ne bénéficie d’aucune reconnaissance même symbolique. Cette langue est aujourd’hui sérieusement menacée puisque seulement quelques milliers la parlent et souvent sont des personnes d’un certain âge.
Est-il juste que l’Etat mauritanien passe devant les experts des Nations Unies sans que ce point soit soulevé. Bien plus que cela, l’Etat mauritanien doit être interpellé pour qu’il révise sa politique d’arabisation des Berbères et que la Convention dont il est partie exige de lui l’engagement de faire en sorte que cesse cette discrimination dont sont victimes les berbérophones.
N’est-il pas temps que l’Etat mauritanien sache que les Berbères de Mauritanie ne seront pas oubliés même si tout est fait dans ce sens.
L’on peut espérer que les experts du CERD, comme ils l’ont fait pour la Tunisie et la Libye, tirent la langue berbère de l’oubli dont l’Etat mauritanien veut la sombrer puisqu’ils viennent de recevoir un rapport de Tamazgha (Paris) qui attire leur attention sur l’injustice que subissent les berbérophones de Mauritanie et sur la situation critique dont la langue berbère se trouve aujourd’hui en Mauritanie.
Fidèle à son action de défense des droits et intérêts des Imazighen (Berbères) à travers le monde, et dans la continuité de son action d’alerte des instances internationales de droits de l’Homme, Tamazgha n’a pas laissé passer cette occasion et vient donc de poser le problème berbère en Mauritanie auprès des Nations Unies.
Nous publions ci-dessous le communiqué rendu public par Tamazgha à ce sujet.
Ufrin.
N.B. : Photo d’llustration de l’article / Copyright P. Lesens, 2000 (Grotte de Zarga).
65ème session du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD)
Lors de la 65eme session du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) qui se tient du 2 au 20 août 2004 à Genève, l’Etat mauritanien est appelé à fournir un rapport sur les mesures législatives, judiciaires et administratives qui ont été prises pour s’acquitter de ses obligations en vertu de la Convention internationale pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (ICERD).
En la circonstance, l’Etat mauritanien présente un texte mettant en scène une mécanique institutionnelle tout à fait formelle d’allure hautement protectrice des libertés publiques et des droits conférés par la Convention, mais en totale contradiction avec la réalité de tous les jours en Mauritanie.
Ce formalisme de façade cache l’énorme fossé qui s’est structurellement installé entre la légalité mauritanienne qui, seulement dans ses textes, se veut respectueuse des traités internationaux relatifs aux droits de l’Homme et l’application réelle de ces instruments ainsi que la protection effective des droits qu’ils reconnaissent, cependant très formellement, aux ressortissants de l’Etat mauritanien.
L’une des principales contradictions se constate dans le traitement que réserve l’Etat mauritanien aux berbérophones.
Le rapport présenté par l’Etat mauritanien ne reconnaît aucunement la langue berbère, les populations berbérophones ni leurs droits.
Tamazgha, ONG de défense des droits des Imazighen (Berbères), a présenté à cette occasion un rapport alternatif intitulé "Le berbère en Mauritanie : une langue en voie d’extinction". Dans ce dernier, Tamazgha revient sur la présence linguistique et culturelle incontestables mais fragile des berbérophones en Mauritanie ainsi que sur les principales violations de la Convention internationale pour l’élimination de toutes formes de discrimination raciale. Dans ce même rapport, Tamazgha formule des propositions pour éliminer les discriminations dont sont victimes Imazighen (les Berbères).
Tamazgha s’élève contre les violations caractérisées des droits des berbérophones en contradiction avec les conventions de protection des droits de l’Homme pourtant signés et ratifiées par l’Etat mauritanien. En effet, la Constitution de la Mauritanie impose toujours unilatéralement la langue arabe aux berbérophones. De ce fait, l’Etat a mené et mène toujours une politique délibérée d’arabisation forcée.
Notons que la Constitution mauritanienne reconnaît trois langues nationales, autre que la langue arabe (par ailleurs, l’unique langue officielle), mais pas le berbère. Plus qu’une exclusion, cette attitude dénote un mépris délibéré à l’égard des berbérophones et par la même de leur langue.
Tamazgha demande que des mesures urgentes et sérieuses soient prises de sorte à conforter les berbérophones, de par une reconnaissance institutionnelle de leur langue, et que l’extinction de tamazight (langue berbère) soit réellement évitée. Pour ce faire, des mesures étatiques à court terme dans les domaines de la reconnaissance institutionnelle, l’Education, la Culture et l’Information s’imposent.
Tamazgha appelle de tous ses vœux pour que les membres du Comité pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciales interpellent l’Etat mauritanien sur sa politique d’exclusion des berbérophones et lui rappellent la nécessité de prendre les mesures nécessaires pour que les berbérophones accèdent à leurs droits linguistiques et culturels que leur garantit la Convention.
Tamazgha,
Genève, le 6 août 2004.
– Lire le rapport de Tamazgha
– La Mauritanie nie l’existance du berbère. Lire le Communiqué de Tamazgha
Tamazgha
47, rue Bénard,
75014 Paris,
France.
Tel : +33.1.45.45.72.44.
Fax : +33.1.49.81.02.32.
E-mail : Tamazgha_ong@yahoo.fr
Messages
1. > Le berbère en Mauritanie : une langue en voie d’extinction, 9 août 2004, 19:23, par atanane
la mauritanie, à l’instar de l’arabie séoudite, du soudan et de la libye, est l’un des derniers Etats racistes et esclavagistes de la planète, dont la constitution est fondée sur la primauté de la race arabe et musulmane ; alors, vous savez, l’identité amazighe...
Voir en ligne : http://www.asays.com