Accueil > Débats > Analyses > "Une culture de la résistance"

Kabylie

"Une culture de la résistance"

dimanche 1er janvier 2006, par Masin

Nous reproduisons ci-dessous une interview de Salem Chaker accordée à Dominique Lagarde de l’hebdo-madaire l’Express.
Il revient sur les principaux évènements qui ont marqué la Kabylie et souligne l’incapacité de cette dernière à atteindre une maturation politique qui lui permette de s’inscrire dans la duré...
Nous tenons à remercier L’Express qui nous a autorisé à publier cette interview.




"Une culture de la résistance"





Professeur de langue et de civilisation berbères à l’INALCO [1], à Paris, Salem Chaker retrace l’histoire de la Kabylie, jalonnée de révoltes contre l’occupant, puis contre le pouvoir central.



D’où vient la réputation qu’a la Kabylie d’être une région frondeuse ?

De son histoire, ancienne et récente. Tout le passé de la Kabylie est fait d’affrontements avec le pouvoir cen-tral. Cela fût déjà le cas au début du XVIe siècle, après l’installation à Alger de l’empire ottoman, puis au 19ème siècle au moment de la conquête française. C’est l’une des régions qui a résisté le plus longtemps - elle a été conquise en 1857, alors qu’Alger l’était en 1830. Sa pacification, ponctuées de plusieurs révoltes dont la plus importante en 1871, a été des plus difficiles, laborieusement acquise. Les Kabyles ont ensuite joué un rôle clé dans l’émergence du mouvement national algérien.


Furent-ils le fer de lance de la lutte pour l’indépendance ?

Oui, aussi bien sur le plan politique que sur le plan militaire. Dès la fin des années 1920, lorsque naît le mouvement nationaliste, une majorité de ses cadres sont des Kabyles. Il en sera de même au moment de la création du Front national de libération (FLN), en 1954. Pendant toute la guerre d’Algérie, la Kabylie joue, sur le plan militaire, un rôle qui dépasse largement son poids démographique. Il y a donc bien une pérennité dans ce qui est une sorte de culture de la résistance. C’est d’ailleurs là une caractéristique commune à l’ensemble du monde berbère, qui tient sans doute autant à l’histoire de l’Afrique du nord qu’à la géographie de ces régions montagneuses.


Dès 1963, le Front des forces socialistes (FFS) de Hocine Aït-Ahmed conteste l’autorité du nouveau pouvoir. Peut-on dire de cet épisode qu’il a été la première guerre civile après l’indépendance ?

Je pense que oui, même si c’est un événement qui est resté circonscrit à la Kabylie. Il faut en tous cas souli-gner qu’un an seulement après l’indépendance, la Kabylie se retrouve déjà en conflit ouvert avec le pouvoir qui est installé à Alger. Ce que conteste alors Aït Ahmed c’est l’absence de démocratie, le système du parti unique, et la place faite à l’armée des frontières au détriment des maquisards de l’intérieur.


Il ne s’agit donc pas, à cette époque là, d’une revendication identitaire ?

Explicitement non. Mais le fait que cette révolte ne concerne que la Kabylie est quand même très sympto-matique. En outre, plusieurs des lieutenants d’Aït-Ahmed étaient des berbéristes affirmés.


Il faut en fait attendre 1980 et le printemps berbère, pour que la revendication kabyle devienne réel-lement identitaire. Pourquoi si tard ?

Jusqu’à 1980 cette revendication culturelle ou identitaire n’est portée que par de petits groupes de militants dont beaucoup d’ailleurs sont repliés en France. Les choses avancent, mais de manière souterraine. En 1979, la création de l’université de Tizi Ouzou permet une concentration, sur place, d’intellectuels et de mi-litants. Cela a sans doute joué un rôle dans l’avènement du Printemps berbère, en 1980. Par ailleurs, 1980, c’est un an après la mort de Houari Boumediene. L’Algérie sort de dix-huit ans d’autoritarisme. C’est une époque charnière qui suscite beaucoup d’espoir. On espère que les choses vont bouger. Il y a un contexte favorable à l’émergence de nouveaux mouvements.


Et qu’est-ce qui fait que la révolte de 2001 est au contraire beaucoup moins identitaire que celle de 1980 ? Même si la contestation est une fois de plus circonscrite à la Kabylie, ses mots d’ordre expriment une insatisfaction générale, un ras-le-bol...

Cela tient, je crois, à la détérioration de la situation économique et sociale. Pendant toute la période Boume-diene l’Etat algérien, qui avait des moyens considérables, a pu redistribuer une partie de la rente pétrolière. Le pays s’est installé dans la crise économique à partir des années 80. Les conditions de vie se sont alors dégradées partout, mais cette dégradation a sans doute été plus sensible encore en Kabylie. C’est une région rurale qui cumule un très fort accroissement de la population et un très petit nombre d’emplois. La crise a rendu de plus en plus difficile l’émigration des demandeurs d’emplois vers les grandes villes algériennes, déjà surpeuplées, tandis qu’au même moment la France et les pays européens, terres d’accueil traditionnel-les, fermaient leurs frontières.


On a aussi vu, en 2001, des manifestations de défiance à l’égard des partis à forte implantation ka-byle, comme le RCD (Rassemblement culturel pour la démocratie) ou le FFS...

Oui, parce que, du point de vue de la population, leurs stratégies - tout à fait différentes, au demeurant, puis-qu’il s’agit d’une stratégie de collaboration pour le RCD et d’opposition pour le FFS - n’ont rien donné. Ils n’ont pas été capables de présenter une perspective crédible. Ils ont déçu, et cela d’autant plus qu’ils ont consacré une grande partie de leur énergie à se combattre mutuellement, chacun des deux prétendant à l’hégémonie sur la Kabylie.


Que représentent les arouch ?

Ils ont été représentatifs sans doute pendant une année, ou un peu plus, après les évènements de 2001. Il y a périodiquement comme cela en Kabylie des mouvements de masse, des réactions spontanées qui peuvent être extrêmement vives, mais qui ne sécrète pas de véritable stratégie sur la durée. Il suffit alors à l’Etat d’être patient pour récupérer, neutraliser, infiltrer, en jouant sur la lassitude. C’est dans cette réalité que s’inscrit l’expérience des arouch. On y retrouve cette espèce d’inachèvement et d’immaturité politique qui caractérise la Kabylie. C’est une région qui génère de manière cyclique de grands mouvements de contesta-tion, sans que ceux ci parviennent à un degré de maturation politique qui leur permette de s’inscrire dans la durée. Peut-être parce qu’il y a une culture d’opposition, voire de victimisation, mais pas de culture de pro-jet.


Propos recueillis par Dominique Lagarde

Interview parue dans l’édition du 24 novembre 2005 de l’hebdomadaire "L’Express"
Publiée avec l’aimable autorisation de L’EXPRESS.


[1Institut national de langues et des civilisations orientales

Messages

  • Très juste. Il faut sortir de la culture de victimisation et de résistance. Il faut passer à la culture de projets et d’affirmation. Fini le temps de la chanson engagée, des marches printanières du 20 avril avec des bouquets de fleurs et des femmes en robes kabyles... il est temps pour les Kabyles et la Kabylie de s’affirmer en tant peuple et en tant Etat.

  • A propos des aspects positifs de la colonisation, on entend Boutef et cie accuser la France de négationnisme et de révisionnisme. N’est-ce pas ce que les Arabo-islamistes prêchent en Afrique du nord, auprès des Berbères, à savoir, que l’Islam leur a apporté des lumières ? Ne seraient-ils pas eux aussi des négationnistes et des révisionnistes ?

  • Peut-on me répondre à cette question : pourquoi certains politicards kabyles ultranationalistes sont pour l’indépendance de la Palestine, mais contre celle de leur chère Kabylie, surtout quand on sait que la Kabylie est plus grande et plus peuplée que la Palestine ?

    • Pour atteindre notre but, on doit se donner les moyens. En politique, on ne dit pas ce qu’on veut faire, mais ce qu’on peut faire. Fini les combats de pierres, on n’est pas des primitifs. On doit se doter d’une logistique de paix et de guerre. Décrétons un Etat et marchons. Arrêtons de pleurer sur nos malheurs. Arrêtons de subir des régimes militaro-religieux. Fonçons. Le monde donne toujours raison à celui qui attaque. C’est comme ça que ça se passe, mes amis. On ne peut se permettre le luxe de jouer aux opposants à la française, la France est un pays démocratique, un vrai. Ce n’est pas le cas de l’Algérie. On se veut tolérants. Cela me fait rire. On est qui pour tolérer ? Il faut être puissant pour tolérer. Ce n’est pas notre cas. On est à peine tolérés. Pire, on fait pitié.

    • la kabylie est le berceau de la revendication linguistiqe berbere
      c’est incontestable
      mais la diversité des différent groupes berberophone nous enmènent audela des frontières algériennes et impose par se fait d’autant plus de prudence
      car chaque région présente une configuration particulière et qu’il n’est pas certain du tout qu’elle prenne partout les mêmes formes et les mêmes voies

      mai c’est en kabylie que l’on peut suivre avec le plus de précision le devellopement de ce mouvement notament
      ses traduction explicites, culturelles, idéologique et politique,
      même si au plan historique et éthique le problème berbere est celui de tout le magreb et non celui de l’algérie uniquement.

  • On assiste ces derniers jours au grand retour des chefs politiques kabyles, en l’occurence, Aït Ahmed et sadi. Forts de leur victoire à la Pyrrhus aux municipales en Kabylie, nos don Quichotte reviennent, après un long silence pesant et coupable, pour de nouvelles aventures et pour de nouvelles défaites. Aït Ahmed appelle la presse algérienne à faire son examen de conscience et Sadi récidive et vient défendre la laïcité devant le scénat français. Moi, je me pose 3 questions : 1) Et si Aït Ahmed et Sadi (d’accords pour une fois) n’ont participé aux éléctions municipales en Kabylie que pour retrouver la vie politique, interrompue depuis les événements de Kabylie ? 2) Et si Aït Ahmed et Sadi (unis pour une fois) n’ont participé aux éléctions municipales en Kabylie que pour remettre la Kabylie dans le sillon algéro-nationo-islamo-baâthiste ? Et si Aït Ahmed et Sadi (d’accords pour une fois) n’ont participé aux éléctions municipales en Kabylie que pour "démocratiser" l’Algérie, dans quelques années lumières bien sûr ?

  • Incroyable ! Nos démocrates sont vraiment à côté de leurs pompes. Ils souhaitent démocratiser les mentalités arabo-musulmanes en Algérie au moment où des grandes démocraties, comme la france, assistent impuissantes à l’islamisation des mentalités de leurs populations.

  • Doit-on libérer la Kabylie et nous projeter dans l’avenir ou bien rester sous la domination des Arabo-islamistes et passer notre existence à lutter contre les moulins à vents religieux et à justifier chacun de nos actes : pourquoi on mange du jambon ? pourquoi on fête le nouvel an ? pourquoi on parle en français ? pourquoi on mange du chocolat ? etc. ????

  • Imaginons la Kabylie indépendante : 1) Elle fera partie de l’Europe. 2) Elle aura pour monnaie l’Euro. 3) Elle aura un passeport jaune écrit en kabyle et en anglais ou en français. 4) Elle aura une école scientifique et laïque. 5) Elle sera démocratique et laïque. 6) Elle aura le kabyle comme langue officielle et nationale... Vous pouvez dire que je suis rêveur, mais je ne suis pas le seul. Rêvez tous avec nous, et notre rêve deviendra réalité. A bon entendeur...

  • Les Arouch non plus, comme le FFS et le RCD, n’ont pas répondu à l’attente du peuple kabyle. Durant les événements de Kabylie, les Arouch avaient tous les pouvoirs. Au lieu de s’imposer localement, de rétablir l’ordre, d’assurer la sécurité des biens et des personnes, de réaliser certains projets de developpement, de décrêter un Etat et de prouver ainsi au monde entier notre capacité à nous organiser et à nous affirmer. Au lieu de cela, ils ont rédigé une plate-forme qui n’interesse ni ne concerne personne et joué, en outre, avec le pouvoir la carte du pourrissement. Décidément, il y a quelque chose de pourri dans le royaume de...

  •  Tous les Kabyles rêvent de quitter l’Algérie.
     Tous les Kabyles rejetent l’arabo-islamisme.
     Tous les Kabyles rêvent d’un Etat.
    Pourquoi nous refusons d’assumer tout cela politiquement ? Est-ce par esprit de culpabilité par rapport à nos ancêtres qui sont morts pour l’indépendance du FLN ? Est-ce par nostalgie à l’Algérie qui, elle, n’hésite pas à nous éxiler, emprisonner et nous assassiner ? Est-ce par peur de l’avenir ? Est-ce par peur de ne pas pouvoir nous prendre en charge ? Est-ce par peur des uns des autres ?

  • Bravo l’ami. Il ne faut rien revendiquer à un pouvoir illégitime. Il faut décrêter maintenant. Vive la Kabylie. Tant pis pour ce qui ont peur de ne pas trouver à manger dans une Kabylie libre. Je refuse de vendre mon âme contre de la nourriture. Je préfère vivre de liberté et d’eau fraîche que de manger de la viande hallal à genoux devant le chameau dans le desert.

  • Effectivement, tous les Kabyles rêvent de changer de pays. Et si on changeait plutôt le nôtre, le seul pays que nous avons : la Kabylie ?

  • bonjour
    en ce qui conserne le mouvement de 2001 , jétais present durant ces journées infernales , il faut etre dupe pour ne pas voir les manipulations de toutes part le terme arouch est une invention de qui le pouvoir et les autres , c quand meme une super tricherie qui a sacrifié encore une fois de jeunes innocents en les envoyant à une boucherie quasi certaine , as t on une conscience ? as -t-ons un jour ces pseudo politicard des week end songer à se mettre à la place d’une mére qui a perdu son fils à la fleur d’age , je pense que les drames de cette région sont le fruit de notre culture basée sur le repli sur sio , la jalousie ; la haine de voir son frere emergé du lot , l’égalitarisme berbere a fait des ravages depuis des siecles
    les nouvelles generations doivent etre orientés vers l’ouverture d’autres cultures plus rassemblantes ou l’interet general doit primer , penser en groupe avoir une culture qui integre l’autre , admettre avarani avec l’espoir de faire un jour unerevolution culturelle

  • On ne peut plus concis et démonstratif en même temps

    merci Chaker et surtout....accrochez vous bien. Beaucoup de "progressistes" sont nos détracteurs hélas

  • salut chaleureux a tout les internautes et surtout au site qui contribue chacun a sa maniere sur ce sujet et tant d’autre pour ma part je souhaiterai emmetre mon opinion la dessu je partage amplement certaines idees qu’il disent qu’il faut en sortir de l’etat de sentiment de victime ou de mineur car j’en souffre lorsque je voix mes freres s’abaiser devant des arabophones bassement et par dessu des vaurien des que tu les decoucrirais comprhensible un peux leur etat psycanalitiquement parlant meme logique mais juste une chose nous devons changer qlq soit x car en rester la en ai presonnier me diras tu que je suis a cote du sujet non je vais juste dire il faut je suis un sans marche arriere pour une kabylie juste la kabylie car apres kabylie un peux plus de temps en auras bcp de chose et surtout sagement et decidemment pour ceux qui dise et qu’est ce que on vas manger on sait pourquoi ils disent cela saches amies qu’ils ont vendues leurs femme leurs enfant pour un morceau de viande des autre et disent des chose horibles sue lui meme et ses freres kabyle car qlq part un petit avantage materielle le rend aveugle ah ya rabi atnyetef oufisiw voila sur ces mots au bon entendeur mercinb NB LE RAPPORT DE FORCE A FAIT DES GENS PLEINS DE SAVOIR DE CULTURE ET DE LITTERATUREET TOUS CEUX QUI TU VOUDRAS DES LARBIN AU FIS DU SON TEMPS INCROYABLE MAIS C4EST VRAI IL TE PARLERAS LENINE ROUSSEAU SARTRE BOULITIQUE MAIS AVE LE FILS SOUVENT DES ARABOPHONES

  • moi je pense qu’il est temps de tronsformer les révoltes de la population kabylie en un projet.Mais celà necessite la contribution active de tous nos cadres.Nos jeunes ont besoin beuacoup plus de repères et de guides .La kabylie est rebelle mais elle n’est pas aussi belle ces dernières années.

  • Les Zombies de Mohamed ou les Amazighs Zombés par l’Islam

    Ce qui est incroyable mais vrai c’est que les arabophones d’Algérie qui ont été arabisés et islamisés comme des cons et des poules mouillées ne se posent jamais la question-Qui Suis-Je ???-que se pose chaque membre de la famille humaine.

    Ils s’en foutent éperdument de leurs origines, de leur histoire, de leur culture et de leur civilisation. Ils sont là comme des mutants prêts à devenir n’importe quoi et n’importe qui mais jamais eux-mêmes. Ils ont peur, voir même honte, de parler d’eux-mêmes, de réclamer la vérité sur leur devenir et leur histoire et leur existence.

    L’arabo-islamisme a eu raison de leurs cerveaux, de leur intelligence, de leurs facultés et qualités humaines. Ils sont tous devenus comme animaux sauvages comparables à des tubes digestifs agressifs errants sur toute la planète prêts à cracher à chaque instant sur leur identité et à renier leur propre culture et leur propre civilisation mais toujours disposés à mourir et à tuer pour l’identité de l’immoral et barbare Mahomet. Comme disait mon ami Aserdun, « C’est le seul peuple au monde qui n’a aucune volonté propre. » Ces Algériens arabophoniques se contentent d’être ce qu’on leur demande d’être en reniant très facilement ce qu’ils venaient juste d’être.

    Mohamed a fait d’eux de véritables zombies.

    Bienvenue chez les zombies mais faites très attention car leur islam ne se gênerait pas à vous zomber, il est fait pour cela.

  • Résister jusqu’a l’autonomie est la voie a suivre pour la kabylie et des autres régions berbères d’Afrique du nord.

    Nous devons agir avec intelligence,
    poésie,musique,théatre,cinéma...

    Ce sont des moyens de dissuasion pour montrer à l’ennemi qu’on est chez nous !

    Les extrêmistes musulmans sont des démons,L’Islam n’a jamais dit qu’il faut tuer pour devenir Arabe et musulman.

    Nous avons été colonisé,arabisé et islamisé !!!

    Maintenant qu’on nous laisse avec notre Idendité !!!